Le fonctionnement de DIGNITAS
Le fonctionnement de DIGNITAS (PDF)
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Voici le contenu de la brochure:
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Le fonctionnement de DIGNITAS
Sur quels principes philosophiques repose l’activité de cette organisation?
3e édition / mai 2014
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L’association » DIGNITAS – Vivre dignement – Mourir dignement « a été créée le 17 mai 1998. Elle existe donc depuis plus de seize ans et, au cours de cette période, elle a aidé plusieurs milliers de personnes à continuer à vivre, malgré de graves problèmes de santé. Leur souhait d’en finir avec leurs souffrances et leur existence de leur propre volonté a été pris au sérieux, mais, en même temps on leur indiquait – le plus souvent avec la collaboration de médecins – une alternative à l’acte de mettre fin à sa vie avant terme. De ce fait, leur qualité de vie s’est de nouveau améliorée de manière décisive. Souvent, le simple fait de savoir qu’un médecin suisse est prêt à prescrire le médicament létal –ce que nous appelons donner le » feu vert provisoire « – suffit à atténuer la tension et à faire passer à l’arrière-plan le souhait de mourir.
Au cours de la même période, DIGNITAS a aidé plus de 1’700 personnes à terminer leur vie de leur propre volonté, sans violence, en toute sécurité et, dans la plupart des cas, entourées de membres de leur famille et/ou d’amis.
Par ailleurs, DIGNITAS ne s’est pas limitée à accorder cette assistance aux seules personnes domiciliées en Suisse. En effet, le désir d’une personne de pouvoir mettre fin à sa propre vie est reconnu par le Tribunal Fédéral Suisse et par la Cour Européenne des Droit de l’Homme comme un des droits de l’homme, protégé par l’article de 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Pour cette raison, l’association tient à ne discriminer personne en aucune manière – le lieu de résidence n’étant pas une raison d’exclure qui que ce soit.
En parallèle, l’activité de DIGNITAS a mené à des controverses mais aussi à des débats politiques, autant sur le plan international que national.
Ceux qui s’opposent à notre activité sont souvent des membres de groupes conservateurs ou très religieux, qui essaient de présenter leur vi-sion du monde comme la seule valable et de l’imposer à autrui.
Enfin, les médias nationaux et internationaux exposent souvent l’activité de DIGNITAS de manière lapidaire et déformée. Aussi le besoin se fait-il sentir de décrire l’activité de cette association et les principes philosophiques sur lesquelles elle repose.
1. Comment le suicide accompagné est-il préparé au sein de DIGNITAS?
Régulièrement, on peut lire – par exemple dans des reportages médiati-ques dénués de professionnalisme – qu’une personne désireuse de mourir pourrait, en une seule journée, contacter DIGNITAS en Suisse, s’y rendre, voir un médecin qui lui prescrit l’ordonnance du médicament létal et mourir le jour même ou le lendemain. Cette procédure serait même possible sans qu’il soit tenu compte de l’existence ou de l’absence d’une raison suffisante au suicide, donc même dans le cas où surgit l’idée spontanée, particulièrement fréquente dans la vie des gens, de se soustraire par le suicide à des difficultés passagères.
En effet, des personnes vivant à l’étranger lisent parfois de tels reportages; elles considèrent l’article comme la pure vérité, arrivent en Suisse sans annoncer leur venue et souhaitent mourir sur-le-champ. Ces personnes sont par la suite déçues, parfois désespérées, de s’apercevoir que leurs informations sont inexactes et de se voir obligées de retourner chez elles pour suivre d’abord la procédure habituelle de DIGNITAS.
En réalité, un tel voyage, l’entretien avec un médecin, la délivrance de l’or-donnance et le suicide accompagné sont précédés, dans chaque cas, d’une procédure au sein de DIGNITAS qui demande en général jusqu’à trois mois – mais peut aussi durer plus longtemps. Ce n’est qu’une fois cette procédure préparatoire terminée, que le suicide accompagné peut effectivement avoir lieu en l’espace de trois à quatre semaines. De surcroît, les médecins ne sont pas associés seulement à la fin de cette longue procédure, comme s’il s’agissait d’une simple formalité, mais impliqués très tôt et de manière décisive, ce que nous montrerons plus loin dans ce texte.
Nous souhaitons présenter ci-après les éléments essentiels de cette procé-dure et son déroulement dans le temps.
1.1. Première prise de contact
1.1.1. Les personnes qui contactent DIGNITAS
DIGNITAS est contactée aussi bien par des personnes souhaitant soutenir activement l’association dans ses efforts pour imposer « l’ultime droit de l’homme » (déterminer soi-même quand et comment terminer sa propre vie) et donc adhérer, que par des personnes souhaitant revendiquer cet » ultime droit de l’homme « pour elles-mêmes, immédiatement ou ultérieurement, sans avoir en premier lieu la volonté de lutter elles-mêmes en faveur de cette possibilité ou de soutenir l’association.
Aussi longtemps qu’une personne ne s’est pas décidée pour l’une ou l’autre de ces possibilités et qu’elle n’a donc pas adhéré à l’association, mais qu’elle demande des informations, voire un suicide accompagné, elle est classée par nos services dans la catégorie des » personnes intéressées «.
1.1.2. Les personnes qui souhaitent un suicide accompagné
Nous informons toute personne intéressée que les prestations de l’association sont exclusivement réservées à ses adhérents et que l’adhésion préalable est donc impérative.
Cette première prise de contact peut s’effectuer par toutes les voies de communication possibles: par courrier, par téléphone, par courriel ou encore en se présentant personnellement. Dans certains cas, la demande est déposée par des tiers : c’est le cas lorsqu’un individu est déjà dépendant de tierces personnes et n’est plus capable d’écrire ou de téléphoner lui-même, ou encore lorsque la personne concernée vit dans un milieu laissant supposer qu’il s’opposerait à ses intentions.
1.1.2.1. Aucun délai d’attente avant la demande de suicide accompagné
Parfois, les personnes intéressées demandent si DIGNITAS applique un délai d’attente à respecter entre le moment de l’adhésion et le moment de la demande de préparation d’un suicide accompagné.
DIGNITAS n’applique aucun » délai d’attente « entre le moment de l’adhésion à l’association et la demande de préparation d’un suicide accompagné.
La raison est évidente: si nous devions appliquer un tel délai d’attente, nous serions totalement incapables d’aider dans les cas d’urgence – ce qui n’est absolument pas acceptable – ou alors, nous devrions faire de nombreuses exceptions à la règle, ce qui entraînerait des problèmes de délimitation.
Au lieu d’un délai d’attente, DIGNITAS applique le principe qu’il ne faut jamais approuver un accompagnement au suicide avec précipitation. Ce qui compte, ce sont toujours les circonstances concrètes de la vie de la personne qui demande cette aide. Sur ce point-là, l’activité de DIGNITAS suit l’opinion formulée par le théologien zurichois JOHANNES FISCHER, selon qui, pour des raisons d’éthique, il ne faut pas laisser seules des personnes dans un moment aussi difficile de leur vie (JOHANNES FISCHER, Zur Aufgabe der Ethik in der Debatte um den assistierten Suizid. Wider ein zweifaches Missverständnis, in: Christoph Rehmann-Sutter, Alberto Bondolfi, Johannes Fischer & Margrit Leuthold (éditeurs), Beihilfe zum Suizid in der Schweiz, Beiträge aus Ethik, Recht und Medizin, Berne 2006, p. 203 ss. et notamment p. 210).
1.1.2.2. Conseils immédiats même pour les personnes qui ne sont pas (ou pas encore) adhérents
Ce même principe s’applique bien sûr dès les premiers instants de la prise de contact, il ne dépend donc pas de l’adhésion de la personne concernée. Nous avons en effet pour règle d’être aussi rapidement et simplement que possible aux côtés d’une personne qui recherche de l’aide.
Nous informons immédiatement au moyen d’indications précises la personne recherchant de l’aide lorsqu’il s’avère à ce moment-là (ou éventuellement plus tard) qu’elle peut obtenir une aide directe dans son environnement immédiat – par exemple, auprès d’un de ses médecins traitants, d’une clinique spécialisée située à proximité ou encore d’un autre service ou d’une autre institution qui paraissent appropriés.
Cette attitude est particulièrement importante dans le cas de personnes qui souhaitent mettre fin à leur vie le plus rapidement possible du fait de dou-leurs intolérables. Souvent il n’a pas été possible jusque-là d’atténuer ces douleurs pour permettre à la personne de retrouver une qualité de vie suffisante et donc de renoncer au souhait de mourir ou au moins de le re-léguer à l’arrière-plan.
Un exemple particulièrement instructif de tels conseils reçus de la part de DIGNITAS dans le contexte d’une situation de douleur a été décrit il y a quelques années dans le journal Süddeutsche Zeitung. L’article raconte les expériences faites avec DIGNITAS par une personne intéressée et cite le nom de cette dernière (voir Süddeutsche Zeitung du 24 juin 2008, page 3, Munich).
Le mercredi 14 novembre 2007, une personne que DIGNITAS ne connais-sait pas encore a envoyé à l’association le courriel suivant:
» De: Lubybettina@xxxxxx [mailto:Lubybettina@xxxxxx] Envoyé: mercredi, 14 novembre 2007 21:10 A: Dignitas Objet: Demande urgente
Mesdames, Messieurs, Je vous demande d’urgence de l’aide et des informations. Je suis atteinte de SEP et je souffre de violentes douleurs que je ne veux ni ne peux vraiment plus supporter. Bettina Meierhofer Rx Str. xx D-80xxx München 089 xxx xx xxx «
Quatre-vingt dix minutes plus tard, le même mercredi soir à 22 h 40, DIGNITAS a envoyé la réponse ci-après à Mme Meierhofer:
» Madame, De retour d’un déplacement, je viens de lire votre message. Je m’empresse de vous ré-pondre avant même que, demain jeudi, mes collaboratrices et collaborateurs soient présents. Comme vous souffrez de violentes douleurs, je me pose en premier lieu la question de savoir si le traitement médicamenteux de vos douleurs est suffisant. Vous devriez éventuellement contacter le professeur Borasio de la clinique Grosshadern et le saluer de ma part. Il est spécialiste des soins palliatifs et devrait être capable de vous aider très rapidement à soulager vos douleurs. Nous parlerons de tous les autres aspects une fois ce contact établi. Vous pouvez joindre le professeur par e-mail à l’adresse suivante: Borasio[at]lrz.uni-muenchen.de Vous trouverez des informations sur notre site Internet www.dignitas.ch; veuillez suivre le lien » Zu den Unterlagen «. Meilleures salutations DIGNITAS Ludwig A. Minelli «
L’article publié dans le Süddeutsche Zeitung explique que Madame Meierho¬fer, après un certain délai de réflexion, s’est effectivement adressée au professeur et qu’il a pu l’aider. Elle était heureuse de ne pas s’être rendue en Suisse, mais se réservait toujours cette voie pour le cas d’une aggravation. A la suite de cette publication, DIGNITAS a reçu de Mme Meierhofer le message suivant:
» De: Lubybettina@xxxxxx [mailto:Lubybettina@xxxxxx] Envoyé: jeudi, 3 juillet 2008 13:35 A: Dignitas Objet: Remerciements
Monsieur, Je tiens à vous remercier de votre conseil et de votre intervention. Vous m’avez beaucoup aidée, j’en ai pris conscience une nouvelle fois en lisant l’article du Süddeutsche Zeitung. Avec tous mes remerciements et mes salutations cordiales Bettina Meierhofer «
Dans ce contexte, nous tenons à souligner qu’à l’exception du renvoi au site Internet de DIGNITAS dans le premier message – qui recommandait à la personne intéressée de s’adresser au professeur Borasio –, aucune publicité dans le but de recruter Mme Meierhofer comme adhérente n’a été faite de la part de DIGNITAS.
Plusieurs exemples analogues se trouvent dans les archives de messagerie électronique de DIGNITAS. En revanche, l’association ne garde évidemment pas trace du grand nombre d’informations données régulièrement à des personnes intéressées au téléphone, par des collabora-trices et collaborateurs de DIGNITAS. Tout particulièrement dans les situations de souffrance physique, il existe toujours un risque que la personne soit suivie par un médecin dont les connaissances en matière de traitement de la douleur sont insuffisantes – une réalité malheureusement souvent constatée par DIGNITAS, surtout chez les médecins en Allemagne. Un reportage à la une du magazine d’information allemand DER SPIEGEL (n° 36/2008 du 1er septembre 2008, page 154 et ss, en part. p. 160) l’a également signalée. Le ÄRZTEZEITUNG en ligne du 19.2.2014 signale qu’en Allemagne 15 millions de personnes souffrent de douleurs chroniques, que les médecins spécialistes sont trop peu nombreux et qu’il faudrait entre 5’500 et 6’000 experts de la douleur supplémentaires.
1.2. Envoi des premières informations par courrier ou courriel
Les personnes qui n’adhèrent pas à l’association dès le premier contact reçoivent tout d’abord les premières informations au sujet de l’association par courrier normal ou par voie électronique, accompagnées de l’invitation à les lire attentivement.
1.3. Déclaration d’adhésion
Lorsque DIGNITAS reçoit une déclaration d’adhésion signée, elle confirme à l’adhérent son adhésion et lui envoie en même temps également les directives anticipées de DIGNITAS, la facture de la cotisation ainsi que d’autres informations, si désiré.
1.4. Première demande de préparation d’un suicide accompagné
La première demande de préparation d’un suicide accompagné peut arriver avant la demande d’adhésion à l’association, donc provenir d’une personne considérée comme intéressée. Par ailleurs, la demande peut également être envoyée par des personnes qui ont déjà rejoint l’association à une date précédente.
1.5. Envoi par courrier ou courriel des informations requises
Lorsque DIGNITAS reçoit une première demande de préparation d’un suicide accompagné, elle commence par envoyer à la personne concernée les informations spéciales nécessaires à cet effet.
1.5.1. Concernant les situations urgentes
Lorsqu’il s’avère que la situation est particulièrement urgente, DIGNITAS essaie, dans la mesure du possible, de contacter la personne concernée par téléphone ou par courriel, de lui transmettre les informations oralement et, si nécessaire, d’engager immédiatement des mesures d’aide.
Ces dernières sont essentiellement des propositions portant sur la manière de procéder sur place.
Ici s’applique également le principe du soutien rapide, car le simple fait de savoir que quelqu’un s’occupe d’elle peut déjà soulager de façon considérable la personne qui se trouve dans une situation de désespoir.
1.5.2. Contacts à l’étranger
Dans divers pays, DIGNITAS possède de bons contacts avec des organisations ou des médecins auxquels elle peut faire appel pour qu’ils offrent ou organisent une aide rapide sur place. Ces contacts rendent également des services précieux lors des vérifications au cours d’une procédure au sein de DIGNITAS, par exemple en aidant à obtenir des documents médicaux ou d’état civil, ou encore en procurant des conseils médicaux et en indiquant des solutions alternatives aux personnes intéres-sées et aux adhérents.
1.5.3 Conséquence économique
Cependant, cette attitude entraîne également des conséquences économiques pour DIGNITAS: les dépenses relatives aux prestations de conseils fournies aux personnes intéressées ne sont généralement pas supportées par les personnes qui en profitent, mais doivent être financées par le budget général de l’organisation. En d’autres termes, DIGNITAS doit se procurer les moyens financiers nécessaires en recourant aux cotisations ordinaires et extraordinaires de ses adhérents.
Lorsque les conseils de DIGNITAS réussissent à apporter rapidement un soulagement important aux personnes qui souffrent, le souhait de mourir s’en trouve atténué. Nous savons par expérience que très peu de ces per-sonnes en tirent alors la conclusion qu’elles devraient adhérer à DIGNITAS et contribuer ainsi au financement des dépenses pour l’aide qu’elles ont reçu et qui bénéficie aussi à d’autres personnes.
Comme l’a d’ailleurs montré l’exemple de Madame Meierhofer, DIGNITAS renonce même dans de telles situations à inviter la personne à adhérer en se référant aux services rendus et à contribuer ainsi à la prise en charge des coûts correspondants.
D’un point de vue commercial, on peut considérer cette attitude comme erronée ou trop réservée. Toutefois, DIGNITAS n’est ni une entreprise commerciale ni une organisation de pure entraide. L’association n’est pas seulement à la disposition des adhérents payants mais constitue une institution d’utilité publique qui sert d’interlocuteur indépendant et digne de confiance à des personnes placées dans des situations difficiles. Le premier objectif de l’association est de venir en aide à ces personnes et d’améliorer leur situation le plus rapidement possible, s’il existe un moyen concret de le faire. Il s’agit en particulier d’éviter les tentatives de suicide insuffisamment réfléchies et donc risquées, tentatives qui dans la grande majorité des cas échouent en entraînant de graves conséquences.
1.6. Réception de la demande proprement dite, y compris les pièces join-tes
La préparation proprement dite d’un suicide accompagné commence dès la réception par DIGNITAS de la demande explicite d’une telle préparation, formulée par écrit et accompagnée des pièces jointes requises.
1.6.1. La demande
La demande consiste en une lettre personnellement rédigée et signée, adressée à DIGNITAS et comportant la déclaration sans équivoque de l’adhérent – exceptionnellement d’une personne intéressée – qu’il sou-haite mettre fin à sa propre vie avec l’assistance de l’organisation, tout en expliquant la ou les raisons qui l’ont amené à prendre cette décision.
1.6.2. Documents médicaux
Etant donné que, dans pratiquement la totalité des cas, des raisons de santé portant de manière importante préjudice à la qualité de vie du demandeur sont à l’origine d’un tel souhait, DIGNITAS exige des documents médicaux pour justifier ces motifs.
1.6.3. Résumé de la vie
Dans le cadre d’une telle demande et pour compléter le dossier, DIGNITAS exige toujours la remise d’un résumé de la vie. Ce document permet de connaître la personnalité du demandeur ainsi que son environnement familial et professionnel.
Comme de nombreux adhérents de DIGNITAS et personnes intéressées ne sont pas domiciliés en Suisse mais dans quelque 70 pays différents, les premières relations entre eux et l’organisation se font en général à dis-tance.
La pratique habituelle pour les adhérents domiciliés en Suisse veut qu’un membre de l’équipe de l’association leur rende personnellement visite avant ou après le dépôt de la demande de préparation d’un suicide accompagné. Dans le cas des personnes domiciliées à l’étranger cette pratique n’est, pour des raisons compréhensibles, généralement pas réalisable.
1.7. Vérification dans le cadre de DIGNITAS
Après réception de telles demandes, les collaboratrices ou collaborateurs de DIGNITAS vérifient, d’une part, si le dossier est complet et, d’autre part, s’il existe un moyen de fournir rapidement aux demandeurs des informations sur d’éventuelles alternatives susceptibles de leur permettre de poursuivre leur vie dans de meilleures conditions.
1.7.1. Entrée en contact avec l’adhérent / alternatives en faveur de la vie
Lorsque tel est le cas, l’association contacte le demandeur, en général par téléphone, sinon par écrit, par courrier ou par courriel.
1.7.1.1. Orientation vers une amélioration du traitement
Il peut s’agir de propositions qui tendent à améliorer une thérapie, par exemple, comme on l’a décrit plus haut, en cas de souffrance intense, ou de propositions qui indiquent des possibilités de traitement.
Cependant, dans un grand nombre de cas, de telles alternatives ne sont absolument pas envisageables. Il s’agit, d’une part, des situations où, selon son évolution habituelle, la maladie à l’origine de la demande n’est pas censée s’améliorer mais seulement s’aggraver (comme c’est le cas pour les maladies neurologiques telles que l’atrophie multisystématisée, la sclérose en plaques, la sclérose latérale amyotrophique, etc.). D’autre part, il s’agit de cas où la maladie a déjà tellement progressé qu’il faut parler de phase terminale.
1.7.1.2. Orientation vers un traitement palliatif
L’association fournit souvent des informations sur d’éventuels traitements palliatifs susceptibles de soulager le patient. L’expérience montre que de nombreux médecins (et donc le grand public) connaissent insuffisamment les possibilités de la médecine palliative. Ces médecins ne peuvent donc pas conseiller leurs patients en matière de soins palliatifs, possibilité qui pourrait constituer une alternative à un état difficilement supportable.
1.7.1.3. Orientation vers une euthanasie passive
Parfois, un conseil orienté vers l’euthanasie passive s’impose.
En 2008, un professeur de médecine très âgé s’est ainsi adressé via un des membres de sa famille à DIGNITAS pour demander la préparation rapide d’un suicide accompagné. Le soupçon d’un cancer des poumons ayant été confirmé, il a souffert d’un épanchement pleural, et son pneumologue lui a retiré en deux séances 1,4 et 2,0 litres d’eau de la cavité pleurale. Le patient avait expliqué au pneumologue qu’il préférerait mourir à ce moment-là, et le médecin aurait été prêt à lui faire l’ordonnance nécessaire pour le pentobarbital de sodium (ou pentobarbital sodique), à condition toutefois qu’un psychiatre constate auparavant la capacité de discernement de son patient et l’absence d’un épisode dépressif.
La tentative de DIGNITAS – demander à un psychiatre de renom, spécialiste des dépressions et auteur spécialisé de la même université, de venir en aide à son collègue professeur –, s’est heurtée à un refus catégorique, immédiatement transmis par courriel. DIGNITAS a alors recommandé au membre de la famille de proposer au patient de parler avec un de ses médecins traitants de l’éventuelle sédation qu’il souhaiterait et de la profondeur de celle-ci, tout en renonçant au traitement de la pleurésie. La maladie de base pourrait ainsi, sans faire souffrir le patient de détresse respiratoire, évoluer jusqu’à l’issue naturelle. Le patient a suivi cette recommandation; il est décédé au bout de quelques jours alors qu’il était sous l’effet des sédatifs – et donc sans ressentir de détresse respiratoire.
1.8. Envoi de la demande à un médecin
1.8.1. En règle générale
Après avoir vérifié que la demande contient toutes les informations néces-saires, DIGNITAS soumet la demande à l’appréciation d’un médecin indépendant de l’organisation.
Dans la lettre d’accompagnement, l’organisation demande au médecin de lui faire savoir s’il est en principe prêt, sur la base des documents joints, à délivrer au demandeur l’ordonnance adéquate; s’il est éventuellement prêt à le faire après avoir reçu des documents complémentaires; ou s’il refuse de délivrer l’ordonnance.
L’association opte en général pour cette procédure lorsque, selon l’appré-ciation des collaboratrices et collaborateurs de DIGNITAS, la demande ne soulève pas de problème particulier.
1.8.2. En cas de problèmes particuliers
Il arrive que, selon l’avis des collaboratrices et collaborateurs de DIGNITAS, la demande soulève des problèmes particuliers, impliquant des vérifications supplémentaires, ou que la demande ainsi que les documents remis ne soient pas facilement compréhensibles du fait de leur contenu ou de la langue dans laquelle ils sont rédigés. DIGNITAS peut alors recourir à des médecins expérimentés, connaissant de nombreuses langues étrangères, pour leur soumettre tout d’abord la demande afin de recueillir leur appréciation et leur conseil.
Après réception de ces avis, s’il en ressort que l’appréciation par un médecin pouvant délivrer une ordonnance se justifie, la demande sera ensuite envoyée à un tel médecin.
1.8.3. Vérifications supplémentaires
Lorsqu’il s’avère que les documents ne suffisent pas pour apprécier la de-mande de manière définitive, DIGNITAS invite l’adhérent qui a présenté la demande à lui fournir les documents complémentaires souhaités.
1.9. Appréciation par le médecin
Le médecin contacté étudie le dossier, souvent volumineux, et peut ensuite répondre aux questions posées par DIGNITAS en retournant la lettre d’accom¬pagnement, complétée par sa décision.
1.9.1. Refus
Lorsque le médecin refuse la délivrance de l’ordonnance, il justifie son refus.
Dans ce cas, DIGNITAS ne se contente pas d’informer l’adhérent que la de-mande a été rejetée. L’association essaie d’expliquer de manière compréhensible les motifs du médecin. Ce faisant, DIGNITAS veille à proposer d’autres options à l’adhérent et à lui donner la possibilité de réagir à la décision du médecin.
Cette manière de procéder permet en général d’éviter que l’adhérent juge sa situation sans issue et qu’il entreprenne, dans un acte de désespoir, une tentative de suicide liée généralement à un risque très élevé d’échec, voire d’altération supplémentaire de son état de santé (cf. à ce sujet la réponse du Conseil fédéral du 9 janvier 2002 à la Question ordinaire du Conseiller national Andreas Gross concernant les suicides et tentatives de suicide, à trouver sur Internet sous le lien suivant: http://www.parlament.ch/f/Suche/pages/ geschaefte.aspx?gesch_id=20011105 )
1.9.2. Refus provisoire; demande de documents complémentaires
Lorsque le médecin refuse seulement de manière provisoire de délivrer l’or¬donnance en répondant: » Eventuellement. J’aurais en plus besoin de… «, DIGNITAS en informe l’adhérent afin qu’il se procure les documents complémentaires ou fasse effectuer les examens supplémentaires souhaités, ce qui est relativement souvent le cas.
Lorsque le demandeur vit dans un pays où DIGNITAS dispose d’organisations ou de personnes ralliées à sa cause et éventuellement prêtes à aider, leur soutien peut également être sollicité (cf. 1.5.2., page 7).
Ces contacts sont particulièrement importants dans les pays où, selon les expériences faites par DIGNITAS, il est relativement difficile pour les patients d’obtenir des documents médicaux. Dans toute une série de pays, les médecins conservent une attitude paternaliste et interprètent le privilège thérapeutique de manière particulièrement large.
1.9.3. » Feu vert provisoire «
Lorsque le médecin a donné son accord, l’organisation informe l’adhérent de ce » feu vert provisoire «: le médecin est prêt, à condition d’avoir eu deux entretiens préalables avec l’adhérent, à délivrer l’ordonnance du médicament létal, pourvu qu’aucun obstacle ne se présente lors de la consultation médicale à effectuer. De tels obstacles peuvent être les suivants: signes que le patient dispose d’une capacité de jugement insuffisante ou douteuse quant à la décision de mettre fin à ses souffrances et à sa vie de son propre gré; signes d’une pression exercée par des tiers pour que l’adhérent fasse le choix d’un décès prématuré, ou encore existence d’un épisode dépressif aigu.
En l’informant de ce » feu vert provisoire » , l’association présente égale-ment à l’adhérent les trois possibilités dont il dispose par la suite:
1. considérer le » feu vert provisoire « comme une » issue de secours « et ne rien faire d’autre, en se réservant le droit d’y avoir éventuellement recours plus tard; ou alors
2. prévoir des voyages distincts pour les consultations du médecin et le suicide accompagné, donc rentrer chez lui après les consultations du médecin et l’obtention de l’ordonnance et fixer ultérieurement la date du suicide accompagné, si celui-ci est toujours souhaité; ou encore
3. demander la réalisation du suicide accompagné, faire fixer à cet effet deux rendez-vous successifs avec le médecin et se rendre en Suisse pour ces consultations ainsi que pour le suicide accompagné qui les suivra.
1.9.4. Information sur l’implication des membres de la famille
DIGNITAS attire également l’attention de l’adhérent sur l’importance capitale d’informer si possible les membres de la famille et les amis de l’éventuel événement imminent. Cette démarche leur donne l’occasion d’accompagner l’adhérent jusqu’à ses derniers instants.
De nombreuses remarques que DIGNITAS a reçues de la part de proches comme réaction à des suicides accompagnés soulignent l’importance d’une telle préparation. Celle-ci, et surtout la participation à l’événement, ont pour effet de rendre beaucoup plus facile pour les personnes qui ont perdu un membre de leur famille ou un ami de surmonter la perte et de faire leur travail de deuil: elles sont restées fidèles à la personne aimée jusqu’à la fin, elles l’ont accompagnée, lui ont témoigné leur amour par le renoncement et ont ainsi contribué à la laisser partir en paix.
1.9.5. Information sur des obstacles administratifs particuliers
Au plus tard lorsque l’association informe l’adhérent du » feu vert provisoire «, elle lui explique aussi que d’autres questions administratives doivent être réglées avant que la date du suicide accompagné puisse être fixée.
Afin de permettre aux autorités d’enregistrer et d’authentifier le décès en Suisse d’une personne domiciliée à l’étranger, toute une série de docu-ments d’état civil étrangers sont nécessaires. Au moment du suicide, ces documents ne doivent pas avoir plus de six mois, conformément aux dispositions de l’Ordonnance fédérale sur l’état civil actuellement en vigueur. Selon le pays de résidence de l’adhérent, il peut s’avérer relativement compliqué de se procurer ces documents.
Le délai de six mois fixé dans l’art. 16, al. 2 de l’Ordonnance fédérale sur l’état civil (RS 211.112.2) a son origine dans une intention précise des autorités: elles souhaitent que seules les données des personnes domiciliées à l’étranger qui correspondent le plus exactement possible à l’état présent des registres d’état civil étrangers soient introduites dans le système suisse des registres d’état civil, organisé depuis un certain temps sous une forme dématérialisée (sur un serveur central).
Toutefois, ce règlement a un inconvénient : il contraint les adhérents qui souhaitent se réserver la possibilité de fixer à tout moment la date du suicide accompagné, une fois le » feu vert provisoire « obtenu, à faire renouveler ces papiers tous les six mois et à les remettre encore une fois. Toutefois, nous n’avons vu, jusqu’à présent, personne avancer la date d’un suicide accompagné par rapport à la date initialement prévue en raison de ces problèmes administratifs, bien qu’un tel risque puisse théo-riquement exister.
1.10. Fixer un suicide accompagné
DIGNITAS a fait l’expérience positive suivante : un très grand nombre des adhérents qui ont obtenu un tel » feu vert provisoire » ne donnent plus jamais de nouvelles. Le travail de recherche effectué par une étudiante allemande d’une Haute école spécialisée (domaine du travail social) a montré qu’à une date donnée où des adhérents avaient sollicité la préparation d’un suicide accompagné et obtenu un » feu vert provisoire «, environ 70 % des personnes concernées n’avaient plus jamais donné de nouvelles après avoir reçu cette autorisation. Seuls environ 13 % avaient finalement demandé une date concrète pour un suicide accompagné (cf.: http://www.dignitas.ch/images/stories/ pdf/studie-mr-weisse-dossier-prozentsatz-ftb.pdf ).
Les retours que nous recevons des adhérents montrent que, souvent, le simple fait de savoir que l’accord à un suicide accompagné est donné soulage déjà considérablement les personnes en proie à la maladie et à la souffrance. Cet accord fait en quelque sorte fonction de soupape: la personne n’est plus livrée impuissante à son destin sans avoir d’autre choix, mais entrevoit de nouveau une alternative, une possibilité de décider elle-même. Grâce à cette possibilité de pouvoir choisir, nombreux sont ceux qui décident d’attendre ce qu’un avenir incertain leur apportera. Ils le font parce qu’ils savent qu’ils ont la possibilité de mettre eux-mêmes fin à cette vie en toute sécurité avec DIGNITAS, au moment où leur existence sera trop lourde à porter. D’une part, ils constatent alors qu’ils sont plus forts qu’ils ne le pensaient et, d’autre part, ils font aussi souvent l’expérience que des soins palliatifs appropriés peuvent contribuer à leur assurer une qualité de vie acceptable.
1.10.1. Un principe souverain, celui de l’initiative de l’adhérent
Pendant cette phase aussi, DIGNITAS respecte scrupuleusement le prin-cipe observé pendant tout le processus de préparation d’un suicide ac-compagné, à savoir que ce n’est jamais DIGNITAS mais toujours l’adhérent lui-même qui déclenche l’évolution d’un processus en cours, c’est-à-dire l’étape suivante, par sa demande en ce sens.
Lorsqu’une des différentes phases de préparation se termine par une communication adressée par DIGNITAS à l’adhérent, DIGNITAS ne contactera plus elle-même l’adhérent à ce sujet mais attendra une éventuelle initiative de ce dernier. C’est donc toujours l’adhérent – et lui seul – qui est à l’origine du passage à l’étape suivante. Font, bien sûr, exception à cette règle les communications administratives (par exemple la facture de la cotisation annuelle, un éventuel rappel) ou les communica-tions à caractère informatif (circulaires ou envoi du magazine » Mensch+Recht « aux adhérents germanophones).
1.10.2. Souhait de fixer la date d’un suicide accompagné
Lorsque l’adhérent exprime, à quelque moment que ce soit après avoir reçu l’information sur le » feu vert provisoire «, son souhait de recourir au suicide accompagné qui a été préparé et de fixer une date à cet effet, il déclenche plusieurs activités chez DIGNITAS.
1.10.2.1. Vérification: les dossiers médicaux sont-ils à jour?
Les autorités suisses exigent qu’au moins un des rapports médicaux ne soit pas daté de plus de trois à quatre mois au moment du suicide accompagné. Il faut donc vérifier les dates au préalable – le cas échéant, l’adhérent doit demander un autre rapport médical.
1.10.2.2. Vérification: les documents d’état civil sont-ils disponibles?
DIGNITAS vérifie ensuite si les papiers d’état civil nécessaires sont dispo-nibles, sinon elle les demande.
1.10.2.3. Vérification: tous les autres documents sont-ils disponibles?
Enfin, DIGNITAS vérifie si tous les autres documents, tels que les directives anticipées de DIGNITAS sont disponibles. En règle générale, la date d’un suicide accompagné peut être définitivement fixée uniquement lorsque DIGNITAS dispose de tous les documents et pièces nécessaires sous la forme prescrite.
1.10.2.4. Fixation provisoire de la date souhaitée
Il faut ensuite fixer une date provisoire qui doit correspondre le plus exactement possible à celle que l’adhérent a souhaitée.
1.10.2.5. Fixation de deux consultations médicales
Enfin, il faut se concerter avec le médecin compétent quant aux dates où il pourrait recevoir l’adhérent pour les consultations médicales requises, afin qu’il soit ensuite en mesure de prendre sa décision définitive au sujet de la délivrance de l’ordonnance.
1.10.2.5.1. La pratique de 1998 à fin janvier 2008
Pendant toute la période qui va de la fondation de DIGNITAS, le 17 mai 1998, à la fin janvier 2008, il suffisait que l’adhérent consulte une seule fois le médecin indépendant, collaborant avec DIGNITAS, pour que celui-ci délivre l’ordonnance nécessaire. Bien entendu, il fallait qu’au préalable le processus décrit plus haut se soit déroulé dans le cadre de DIGNITAS. Au cours de cette période englobant neuf ans, huit mois et 14 jours, DIGNITAS a réalisé un total de 832 accompagnements au suicide.
1.10.2.5.2. La pratique depuis le 1er février 2008
Cette pratique a dû être modifiée à partir du 1er février 2008.
1.10.2.5.2.1. Le courrier du médecin cantonal zurichois du 31.1.2008
Par courrier du 31 janvier 2008, le médecin cantonal zurichois, le Dr Ulrich Gabathuler, a annoncé à DIGNITAS qu’il considérerait dorénavant la délivrance d’une ordonnance de pentobarbital sodique après une seule consultation médicale comme une infraction au principe de l’exercice consciencieux de la profession de médecin. Il précisait qu’il engagerait une procédure disciplinaire contre les médecins qui délivreraient l’ordonnance après une seule consultation. Le médecin cantonal ne fournissait aucun motif à cette modification brusque d’une pratique de presque dix ans. Aucune indication n’était non plus donnée sur la manière dont, selon l’avis du médecin cantonal, il fallait procéder, c’est à dire combien d’entretiens devaient être réalisés avec un médecin, à quel intervalle et dans quelles conditions.
1.10.2.5.2.2 Deux consultations médicales
Depuis, deux consultations du médecin responsable ont toujours lieu, et l’ordonnance pour la dose de pentobarbital sodique nécessaire est délivrée après la deuxième consultation.
1.11. Les règles à respecter lors de la réalisation d’un suicide accompagné
Lorsqu’un suicide accompagné est effectivement réalisé, après les différentes phases préparatoires, DIGNITAS requiert toujours, depuis le 1er janvier 2007, la présence de deux membres de l’équipe d’accompagnement au lieu d’un seul. Ils sont tenus de respecter toute une série de règles.
1.11.1. Suivi des adhérents arrivés en Suisse avant un suicide accompagné
Lorsqu’un adhérent qui arrive pour une consultation médicale et un suicide accompagné ne se rend pas directement chez le médecin ou sur le lieu du suicide mais s’installe à Zurich ou dans les environs, une rencontre personnelle entre l’adhérent et un ou les deux accompagnateurs est pos-sible.
1.11.2. Réception sur le lieu du suicide accompagné
DIGNITAS veille dans tous les cas à recevoir en temps voulu l’adhérent et son entourage et à les accompagner dans les locaux prévus lorsqu’ils se rendent directement sur le lieu du suicide accompagné.
1.11.3. Information au préalable des accompagnateurs de DIGNITAS
Le dossier de l’adhérent, comme il est préparé pour sa remise aux autorités, est toujours mis assez tôt à la disposition des accompagnateurs de DIGNITAS, afin de leur fournir suffisamment d’informations sur l’adhérent et sur les raisons qui l’ont amené à un suicide accompagné. Ainsi, les accompagnateurs de DIGNITAS disposent de toutes les informations nécessaires sur le dossier. Ils se rendent, en général, au plus tard une heure avant le moment convenu à l’endroit du suicide accompagné, où ils s’assurent, d’une part, que les locaux sont dans un état correct, et, d’autre part, vérifient encore une fois leurs informations sur le suicide accompagné imminent à l’aide du dossier.
1.11.4. Entretien avec l’adhérent
Après l’arrivée de l’adhérent, éventuellement avec son entourage, et après son accueil, les présentations et l’offre de boissons (thé, café, eau minérale), un entretien détaillé est encore une fois mené avec l’adhérent au sujet de son intention de mettre lui-même fin à sa vie.
1.11.4.1. Aucune obligation d’aller jusqu’au bout
Lors de cet entretien, les accompagnateurs indiquent toujours plusieurs fois et clairement que le fait d’être venu en Suisse ne signifie nullement que l’adhérent est obligé de passer à l’acte. Il est entièrement libre, même à ce moment-là et jusqu’au dernier moment avant d’absorber le médicament définitif, de renoncer au suicide. Les accompagnateurs expliquent également à l’adhérent que DIGNITAS se réjouit chaque fois que quelqu’un se décide en faveur de la vie et retourne chez lui.
L’adhérent qui renonce à ce moment au suicide ne perd pas pour autant son droit de revenir plus tard en Suisse pour faire réaliser un suicide accompagné.
1.11.4.2. Présentation du déroulement du suicide accompagné
Au cours de l’entretien, le déroulement du suicide accompagné est expliqué à l’adhérent et aux personnes qui l’accompagnent, afin de leur permettre d’en connaitre tous les détails au préalable. L’information est spécifiée en fonction de la manière dont l’adhérent absorbera lui-même le médicament.
Lorsque l’adhérent peut avaler, il absorbe le médicament, dissout dans 50 ml d’eau environ, en le buvant.
En cas de tubage gastrique via le nez ou sous forme d’une sonde GEP (gastrostomie percutanée endoscopique) à travers la paroi abdominale ou d’une perfusion ouverte mise en place auparavant, et lorsque l’adhérent est lui-même capable d’actionner une seringue (sans aiguille) qui y est connectée et qui contient la solution du médicament, il introduit ainsi lui-même le médicament dans son corps.
Lorsque l’adhérent n’est pas en mesure d’actionner une seringue mais ca-pable d’actionner par un petit mouvement (par ex. avec les doigts, les orteils, la mâchoire) une télécommande disponible et facile à manipuler, la pompe antidouleur assortie est utilisée.
Lorsqu’en plus un respirateur artificiel est en place, l’adhérent déclenche d’abord également l’appareil dit » terminateur de réseau « qui, une fois le médicament introduit dans le corps, coupe l’alimentation électrique du secteur et arrête ainsi la respiration artificielle après quelque temps.
Lorsque le médicament est absorbé via l’estomac, celui-ci doit être calmé au préalable, ce qui se fait en absorbant environ 70 gouttes de Paspertine (substance active: métoclopramide). Cette précaution permet d’exclure avec une grande probabilité le vomissement du pentobarbital sodique, l’estomac ressentant la substance comme désagréable. (En cas d’intolérance au métoclopramide, il existe d’autres médicaments appropriés). Dans ce contexte, l’adhérent est également informé que le médicament a un goût assez amer, mais qu’il est possible d’absorber im-médiatement après une boisson sucrée ou du chocolat afin de faire passer cette sensation désagréable.
Lorsqu’il est prévu que l’adhérent introduise le médicament dans son corps en déclenchant des appareils auxiliaires (pompe antidouleur avec télécommande), ou qu’il ait recours au terminateur de réseau, ce procédé est également expliqué dans tous les détails au cours de l’entretien.
L’entretien se termine par une question: l’adhérent et les autres personnes qui sont venues avec lui souhaitent-t-ils poser d’autres questions? Si tel est le cas, l’entretien continue en fonction de ces questions.
Cet entretien, comme d’ailleurs tout le suicide accompagné, se déroule sans aucune pression de la part de DIGNITAS quant à sa durée. Encore une fois, conformément au principe qui veut que l’initiative vienne de l’adhérent lui-même (cf. 1.10.1, page 13 et suivantes), la phase suivante du suicide accompagné ne débute pas avant que l’adhérent l’ait lui-même demandé.
1.11.4.3. Lorsque des doutes surgissent
Lorsque des doutes relatifs à la capacité de discernement de l’adhérent surgissent au cours de l’entretien, ou lorsque les accompagnateurs de DIGNITAS ont l’im¬pression que l’adhérent n’agit pas de son plein gré mais sous la pression de tiers, éventuellement aussi de personnes qui sont présentes, l’entretien est d’abord poursuivi ainsi: chacun des accompagnateurs de DIGNITAS parle seul à seul avec l’adhérent, en l’absence de toutes les autres personnes. Lorsque les doutes qui sont apparus ne peuvent pas être levés de manière certaine pour chacun des deux accompagnateurs de DIGNITAS, la procédure d’accom¬pag¬ne¬ment est interrompu et l’ad¬hérent et les personnes qui l’en¬tourent en sont informés.
1.11.4.4. Information sur la procédure des autorités compétentes qui suivra
L’adhérent et les personnes qui l’accompagnent sont également informés sur la procédure des autorités compétentes, dont le but est de s’assurer du caractère extraordinaire du décès (décès extraordinaire DEO), procédure qui fera suite à la constatation de la mort. Il leur est signalé en particulier que ces autorités sont parfois représentées par plusieurs personnes à la fois.
1.11.5. Etablir les derniers documents
Lorsque tous ces sujets ont été examinés en détail, l’adhérent est informé que DIGNITAS a besoin d’une procuration écrite pour pouvoir demander aux autorités l’acte de décès ainsi que la crémation ou le transfert du corps – si ce n’est pas la famille qui s’en charge.
Sans cette procuration, DIGNITAS ne serait pas en mesure de se présenter aux autorités en question (service de l’état civil, service des inhumations) en tant que mandataire. Comme cette question a déjà été traitée au cours de la préparation et que cette prestation supplémentaire a également été facturée, le cas échéant, cette procuration n’engendre aucun coût additionnel. La procuration permet également à l’adhérent de formuler le souhait de renoncer à une éventuelle autopsie après sa mort. Mais il faut lui expliquer que le respect de ce souhait ne peut pas être garanti, eu égard aux incertitudes liées à la situation juridique.
Les membres de la famille et les proches qui accompagnent l’adhérent ont également l’occasion de donner une telle procuration. Elle devient particulièrement importante lorsque, après le décès, il faut entamer une procédure contre l’action des autorités, dans l’intérêt de la personne décédée. La loi suisse ne permet pas de revendiquer des droits au nom d’une personne décédée, en se basant sur un droit de la personnalité qui n’existe plus. En revanche, les membres de sa famille peuvent s’opposer en se fondant sur leur propre droit.
Le dernier document que l’adhérent doit signer est la » déclaration de sui-cide « où il atteste qu’il souhaite de son plein gré mettre fin à sa vie, qu’il recourt pour ce faire à l’accompagnement de DIGNITAS et qu’il décharge DIGNITAS de tous les éventuels risques que l’organisation pourrait encourir. Cela signifie que DIGNITAS ne pourra pas être tenue responsable des risques éventuellement encourus malgré toutes les précautions lors du suicide accompagné.
1.11.6. Faire ses adieux
L’adhérent et les personnes qui l’accompagnent ont ensuite l’occasion de se faire leurs adieux. Lorsqu’ils souhaitent le faire sans la présence des accompagnateurs de DIGNITAS pendant une durée à fixer, ces derniers s’éloignent pendant ce temps et reviennent ensuite.
1.11.7. Administration des médicaments
Vient un moment où toutes les conditions sont remplies et toutes les questions élucidées. On informe alors de nouveau l’adhérent qu’il est libre de retourner chez lui définitivement ou provisoirement. S’il déclare qu’il souhaite mourir à ce moment-là, on peut commencer par lui donner le médicament pour calmer l’estomac, dans le cas où le médicament est administré via l’estomac.
Une demi-heure plus tard, les accompagnateurs de DIGNITAS vérifient une nouvelle fois si l’adhérent souhaite toujours mourir. Si tel est le cas, la dose disponible de pentobarbital sodique est dissoute dans de l’eau du robinet et mise à la disposition de l’adhérent sous la forme adéquate, en fonction du mode d’absorption prévu.
Lors de l’absorption, il est admissible d’aider l’adhérent dans la mesure où cette aide n’entraîne pas l’absorption ou l’introduction du médicament dans le corps (il est donc permis de tenir le verre avec la paille, mais il n’est pas permis d’incliner le verre afin que le liquide pénètre dans la bouche). DIGNITAS veille soigneusement à ce que l’action soit » maîtrisée « par l’adhérent et que cette » maîtrise « ne passe en aucun cas à l’un des accompagnateurs de DIGNITAS ou à une autre personne présente. Immédiatement après l’absorption du médicament par la bouche, des boissons sucrées ou du chocolat sont proposés à l’adhérent afin de lui permettre de couvrir le goût amer dans la bouche.
1.11.8. Prise en charge des membres de la famille
Pendant toute la procédure et surtout dès que l’adhérent s’est endormi, les personnes de son entourage sont réconfortées par un accompagnateur..
1.11.9. Constatation du décès
Les accompagnateurs de DIGNITAS observent l’évolution de la phase de décès. Lorsqu’ils sont convaincus que le décès est survenu, ils le vérifient en contrôlant le pouls, la respiration et le réflexe des pupilles. Toutefois, en présence de ces faits désignés comme » signes incertains de la mort «, ils peuvent également attendre d’être en mesure de déterminer les » signes certains de la mort «, en particulier la lividité cadavérique.
Lorsqu’ils sont convaincus du décès, ils présentent leurs condoléances aux personnes qui ont accompagné la personne décédée et informent par la suite la police du suicide en utilisant le numéro d’urgence, afin que l’enquête des autorités puisse avoir lieu.
1.12. Le résultat des investigations effectuées par les autorités
Au sujet des résultats des investigations effectuées par les autorités, le Conseil d’Etat du canton de Zurich a fourni des informations à différentes reprises et a notamment déclaré :
» Le Conseil d’Etat a déjà signalé à plusieurs reprises que les examens effectués jusqu’à ce jours par les autorités pénales au sujet des accompagnements au suicide – notamment en ce qui concerne les points de vue financiers – n’ont pas produit de preuve de l’existence de motifs égoïstes. «
Le 29 octobre 2007, le directeur de la Justice du canton de Zurich (ministre cantonal de la justice), le Conseiller d’Etat Markus Notter (docteur en droit), a déclaré à la séance du Parlement cantonal (Kantonsrat) zurichois :
» Pour le Conseil d’Etat, il est clair qu’il faut respecter la liberté de l’individu et que celui-ci doit pouvoir décider de sa vie tout comme de la fin de sa vie. De ce fait, le suicide n’est évidemment pas un acte punissable. Il n’en a pas toujours été ainsi dans toutes les sociétés ni dans toutes les circonstances. Il fut un temps où une telle attitude n’allait pas de soi. De plus, en Suisse, l’assistance au suicide n’est pas punissable, à condition qu’elle ne repose pas sur des motifs égoïstes, qu’elle ne soit pas motivée par l’intérêt personnel. Le Conseil d’Etat n’entend pas modifier cette règle ; il lui semble que cette attitude est juste. A vrai dire, cette question ne concerne pas l’Etat, c’est ce qui différencie l’Etat de l’individu (…). En tant qu’individu, on peut prendre une toute autre décision, on peut rejeter le suicide pour soi-même, par conviction chrétienne ou pour d’autres motifs, on peut le faire. Mais l’Etat ne peut pas prescrire qu’on doit rejeter le suicide, il n’a pas le droit de le faire. Il s’agit d’une décision que chacun doit prendre lui-même. C’est une question de liberté individuelle.
Cela dit, nous reconnaissons que les organisations d’assistance au suicide, telles qu’elles existent actuellement, font essentiellement du bon travail, un travail qui sert cette liberté. «
1.13. Conséquence : pas de nouvelles dispositions légales pour réglementer l’assistance au suicide
Les autorités politiques compétentes ont donc fait l’expérience que l’assistance au suicide était pratiquée en Suisse avec beaucoup de soin et de précautions. En outre, une votation organisée le 15 mai 2011 dans le canton de Zurich a montré que près de 85% des votants se prononçaient contre la criminalisation de l’assistance au suicide et que 78% s’exprimaient contre la discrimination des personnes qui n’habitent pas dans le canton de Zurich.
Compte tenu de ces faits, le gouvernement fédéral, les deux chambres du Parlement fédéral et finalement le gouvernement du canton de Zurich ont décidé, après de nombreuses années de louvoiement, de renoncer expressément à réglementer par la loi l’assistance au suicide, mesure exigée à maintes reprises par des personnes insuffisamment informées. Le gouvernement et le Parlement fédéral, tout comme le gouvernement du canton de Zurich, ont donc fini par déclarer que les lois existantes étaient suffisantes.
2. La base philosophique et politique de l’activité de DIGNITAS
La base philosophique et politique de l’activité de DIGNITAS réside dans les valeurs fondamentales qui sont les piliers de l’Etat suisse depuis la création de la Confédération moderne en 1848, ainsi que dans l’évolution de ces valeurs depuis cette date, tant à l’échelle nationale qu’internationale.
Le point de départ est donc l’attitude libérale qui préconise que, dans un Etat libéral, le particulier dispose de toutes les libertés, tant que leur exercice ne nuit pas à des intérêts publics ni à des intérêts justifiés de tiers.
Ces valeurs sont
• le respect de cette liberté et de l’autodétermination de l’individu, au sens du citoyen éclairé;
• la défense de la liberté et de l’autodétermination contre des tiers qui es-sayent de limiter celles-ci pour quelque raison que ce soit, qu’elle soit d’origine idéologique, religieuse ou politique;
• l’humanité, qui a donné naissance à la Croix Rouge, au niveau national et international, sans doute l’exemple phare des tentatives visant à empêcher ou à atténuer la souffrance humaine;
• la solidarité à l’égard des plus faibles, en particulier aussi dans la lutte contre les intérêts matériels de tiers qui s’y opposent;
• la défense de la pluralité comme garant de l’évolution constante de la société, sur la base de la libre concurrence des idées;
• le principe de la démocratie, en association avec la garantie de l’évolution constante des droits fondamentaux.
2.1. Respect de la liberté de l’individu
Le respect de la liberté de l’individu, au sens du citoyen éclairé et responsable (le » Citoyen « au sens où l’entend ARNOLD KÜNZLI, philosophe bâlois spécialiste de l’Etat, décédé en 2008; dans son essai » Bourgeois und Citoyen: Das Doppelgesicht unserer Gesellschaft «, dans: Michael Haller, Max Jäggi, Roger Müller (éditeurs), Eine deformierte Gesellschaft, Die Schweizer und ihre Massenmedien, Basel 1981, S. 299 ff.) se manifeste entre autres dans le fait que la législation positive actuellement en vigueur ne punit plus la tentative de suicide – contrairement à des législations plus anciennes.
Ce que Gertrude, l’épouse de Werner Stauffacher dans » Guillaume Tell «, la grandiose ode à la liberté de Schiller, a ressenti comme liberté – » Le saut de ce pont me rendra libre! « –, revient aujourd’hui de droit à chaque habitant de la Suisse de manière tout à fait naturelle.
Dans son arrêt 31322/07 du 20 janvier 2011, la Cour Européenne des Droits de l’Homme, tout comme avant elle le Tribunal Fédéral Suisse dans son arrêt ATF 133 I 58 du 3 novembre 2006, stipule : » A la lumière de cette jurisprudence, la Cour estime que le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit en mesure de former librement sa volonté à ce propos et d’agir en conséquence, est l’un des aspects de ses droits au respect de la vie privée au sens de l’article 8 de la Convention. «
2.2. Liberté par rapport aux idées de tiers
Il est tout aussi clair que toute personne qui se trouve sur le territoire suisse a droit à la liberté de vivre sa vie indépendamment des convictions individuelles idéologiques, religieuses et autres de tiers.
Personne n’a le droit d’imposer à un autre ses idées personnelles en matière d’idéologie, de religion ou de politique, ni même d’essayer de le faire. Le musulman n’a pas le droit d’imposer ses idées au chrétien, au juif ou bouddhiste, pas plus que le chrétien n’a le droit d’en faire autant à l’égard du juif ou de toute personne appartenant à une autre religion, ni le croyant à l’égard du non-croyant. Enfin, personne n’a non plus le droit de recourir à des prescriptions de l’Etat pour imposer ses idées.
L’Etat doit se porter garant de la société pluraliste et s’abstenir de toute action qui pourrait limiter ce pluralisme dans l’intérêt d’une idéologie quelconque ou l’orienter dans une direction quelconque.
2.3. Humanité
Lorsque se pose la question de savoir si une personne qui souhaite mourir a le droit d’être assistée dans ce but, le facteur humain joue un rôle primordial.
Bien que le terme » humanité « ne soit pas défini de manière très précise, il joue néanmoins un rôle important, par exemple dans la » Déclaration de Genève « que l’Assemblée générale de l’Association Médicale Mondiale a adopté en 1948 et confirmé pour la dernière fois en 2006.
Certes, ce serment ne se réfère pas au suicide médicalement assisté, mais il commence par la formule:
» Je prends l’engagement solennel de consacrer ma vie au service de l’humanité. «
Les dernières phrases du serment sont les suivantes:
» Je garderai le respect absolu de la vie humaine. Je n'utiliserai pas mes connaissances médicales pour enfreindre les droits de l'homme et les libertés civiques, même sous la menace. «
Mais puisque l’expérience prouve qu’il est difficile d’interpréter les termes plutôt flous d’ » humanité «, de » respect « ou encore de » dignité « comme tels, ce n’est pas en tentant d’interpréter ces termes mais en décidant de réfléchir au véritable rôle de la médecine que nous pourrons avancer.
EDGAR DAHL, collaborateur de l’hôpital universitaire (Klinikum) de Giessen, spécialiste allemand de l’éthique médicale, a formulé ce rôle ainsi (dans son essai » Im Schatten des Hippokrates / Assistierter Suizid und ärztliches Ethos müssen sich nicht widersprechen «, paru dans » Humanes Leben – Humanes Sterben «, 4/2008, p. 66-67):
» La médecine, comme chacun sait, se compose principalement de pré-vention, de diagnostic et de thérapie. C'est-à-dire qu’elle essaie de prévenir les maladies, de les reconnaître et de les traiter. On pourrait en déduire que le rôle de la médecine est de maintenir la santé. Effectivement, le Serment de Genève dit entre autres: » Je considérerai la santé de mon patient comme mon premier souci » . Aussi claire qu’elle puisse nous paraître, cette interprétation est néanmoins incomplète. Comme nous le montre en particulier un regard sur la médecine palliative, l’activité des médecins ne se limite en aucune manière au maintien de la santé. Les médecins spécialistes des soins palliatifs se chargent par exemple jour et nuit de patients qui ne pourront jamais recouvrer la santé.
Il paraît donc beaucoup plus approprié de considérer que la tâche de la médecine consiste à soulager la souffrance humaine. Nous sommes confortés dans cette interprétation lorsque nous nous demandons pourquoi la médecine se voue en fait à la prévention, au diagnostic et au traitement des maladies. La lutte contre la maladie n’est pas une fin en soi. Au contraire, elle est entreprise dans le but de nous préserver des souffrances physiques et psychiques qui vont en général de pair avec les maladies.
En accomplissant sa tâche de soulager la souffrance des êtres humains, la médecine doit toujours respecter l’autodétermination de ces derniers. Personne n’a le droit de traiter un patient contre sa volonté. Aujourd’hui, il est généralement reconnu que les médecins ne doivent prendre des mesures médicales ou y mettre fin qu’après approbation explicite [de leur patient]. Par exemple, il dépend toujours et exclusivement de l’accord du patient qu’une mesure visant à prolonger la vie soit mise en place ou arrêtée.
Lorsque l’éthique médicale se fonde, comme je viens de l’expliquer, sur le soulagement de la souffrance et le respect de l’autodétermination, il semble évident qu’elle est absolument compatible avec le suicide assisté. Car le médecin qui satisfait la demande d’un patient en phase terminale de renoncer à toute autre thérapie et de lui prescrire un médicament létal, soulage ses souf-frances et respecte son autodétermination. «
Une politique qui vise à empêcher à tout prix tout suicide, sans se soucier de la volonté de la personne concernée, enfreint les lois de l’humanité. Ce-lui qui oblige ainsi des personnes à tenter de provoquer leur propre mort par des moyens violents, tout en prenant des risques inhumains, agit lui-même de manière inhumaine.
Lorsqu’un être humain désire accomplir sa propre volonté, est-il humain de lui imposer de faire ce qu’une personne concernée, domiciliée en Angleterre, a relaté en 2008 par courriel à DIGNITAS, et de prendre le risque qu’il subisse les conséquences de cet acte?
» Dear Dignitas. My name is J.(xx) H.(xx). I am 19 years old, and live in Scotland, UK. About 2 months ago I attempted to commit suicide by jumping off a multi storey car park. My attempt failed, and instead of dying, I write this email to you from my hospital bed. I crushed both of my feet, broke my leg, broke my knee, broke my sa-crum (part of my pelvis) and most devastatingly, broke my spine, in 3 places, which has resulted in a degree of paralysis in my legs. I spent 6 weeks in hospital in my home town of Edinburgh, and was then transferred to a special spinal rehabilitation hospital in Glasgow. I am told that I will need to spend 6 months at this hospital, and that I will be in a wheelchair for the rest of my life. I now have a loss of sexual function, which seems unlikely to return, as well as huge problems managing my bowels and bladder (I cannot feel them mov-ing). I was already suicidal, and now that I will be disabled for the rest of my life, at such a young age, I truly cannot bear the prospect of life. I am only 19, and I now have the grim reality of 60 years in a wheelchair. The physical pain I am in alternates between bearable and completely unbearable. Perhaps the pain will ease off with time, but this is not a certainty. There are times every day where I scream with pain, due to being moved in bed, hoisted into the wheelchair etc. I would like to ask if I could be considered for an assisted suicide, as I am completely certain I would like to end my life, and believe I should have the right to do so. I would be too afraid to try and kill myself again, given the devas-tating effects of my first failed attempt. It would also be much more difficult to attempt suicide from a wheelchair. I only wish that my country was humane enough to let a person die. Please consider my letter, I hope to hear a response, J(xx) H.(xx) «
Ce qui signifie en français:
» Chère Dignitas. Je m’appelle J.(xx) H.(XX). J’ai 19 ans et je vis en Ecosse, au Royaume-Uni. Il y a environ 2 mois, j’ai essayé de me suicider en sautant d’un parking couvert de plusieurs étages. Ma tentative a échoué et au lieu de mourir, je vous écris aujourd’hui ce courriel de mon lit d’hôpital. Je me suis fracassé les deux pieds, cassé une jambe, un genou, le sacrum (une partie de mon bassin) et – c’est là le pire –, je me suis brisé la colonne vertébrale en trois endroits, ce qui a entraîné la paralysie de mes jambes. J’ai passé 6 semaines à l’hôpital d’Edimbourg, ma ville d’origine, et j’ai été transféré ensuite au service spécialisé de réadaptation de la colonne vertébrale d’un hôpital à Glasgow. On m’a informé que je devrais séjourner 6 mois dans cet hôpital et que je passerais le reste de ma vie en fauteuil roulant. Je déplore également la perte de ma fonction sexuelle – que je ne récupérerai probablement pas – et l’énorme problème de ne pas pouvoir contrôler mes intestins et ma vessie (je ne ressens pas leurs mouvements). De tendance déjà suicidaire, je suis désormais handicapé pour le reste de ma vie, moi qui suis si jeune; je ne peux pas supporter cette vision de ma vie. A 19 ans seulement, je suis devant une cruelle réalité: passer 60 ans en fauteuil roulant. La douleur physique que je ressens passe de supportable à absolument insupportable. Il est possible que ces douleurs s’atténuent avec le temps, mais ce n’est pas certain. Tous les jours, je hurle de douleur à certains moments, parce qu’on me met au lit ou parce qu’on me lève et qu’on m’installe dans mon fauteuil roulant, etc. Je voudrais vous demander si un suicide accompagné est envisageable pour moi, car je suis absolument certain de vouloir mettre fin à ma vie et je crois que je devrais avoir le droit de le faire. J’aurais beaucoup trop peur de faire une autre tentative de suicide, vu le résultat dévastateur qu’a eu l’échec de ma première tentative. De plus, il me serait beaucoup plus difficile, dans mon fauteuil roulant, d’entreprendre une tentative de suicide. Je souhaiterais seulement que mon pays soit assez humain pour laisser mourir quelqu’un. Je vous remercie de l’attention que vous voudrez bien accorder à ma lettre et j’espère recevoir une réponse. J.(xx) H.(xx) «
L’auteur de ce message, bouleversant pour tout être humain qui a des sentiments, n’avait alors pas expliqué le problème à l’origine de sa tendance suicidaire.
Mais une chose est sûre: s’il avait entrevu, une fois devenu suicidaire, la possibilité d’avoir des échanges avec d’autres personnes sur son pro-blème, sans crainte de ne pas être pris au sérieux ou d’être immédiatement hospitalisé dans un établissement psychiatrique, son destin aurait été très probablement différent. On aurait essayé de lui montrer qu’il existe à son problème d’autres solutions que le suicide, et il aurait ainsi eu une possibilité réelle de résoudre ce problème de base sans se faire violence. Il n’aurait pas eu besoin de prendre des risques comme il l’a fait – et avec des résultats aussi désastreux. Dans des conditions humaines, il aurait probablement eu une véritable chance de surmonter ses tendances suici-daires.
Dans ce contexte, il faut également se demander pourquoi l’éthique accepte ou même enjoint que l’on tue un animal qui souffre gravement, tandis que l’on empêche un être humain en proie à de violentes douleurs de mettre lui-même fin à sa vie, sans devoir courir le risque énorme d’échouer, de se blesser et d’aggraver considérablement son état. Quelles idées bizarres nous poussent à déclarer immoral un acte qui s’applique à un être humain qui souffre, alors que nous considérons cet acte humain lorsqu’il concerne un animal dans la même situation? D’autant plus qu’un animal ne peut pas s’exprimer dans le langage humain, alors qu’un être humain est capable de proclamer clairement sa volonté.
2.4. Solidarité dans l’intérêt des plus faibles
La solidarité – surtout avec ceux qui sont parmi les plus faibles et qui souhaitent préserver leur liberté, parfois malgré les intérêts contraires, souvent pécuniaires, de tiers – est une des qualités fondamentales de l’esprit civique suisse.
Mais le principe » un pour tous, tous pour un « ne peut jouer à plein dans les limites étroites de la solidarité que l’Etat crée directement par le biais de sa législation: c’est un principe qui se déploie entièrement dans le vaste champ de la solidarité sociale de la société civile, ce qui suppose que certains groupes de personnes prodiguent leur attention à d’autres groupes ou individus qui ont besoin d’une aide particulière.
2.5. Pluralité
La défense du système pluraliste, seul garant de la préservation du libre débat d’idées et donc de l’évolution de la société, est tout aussi essentielle.
2.6. Démocratie et droits fondamentaux
Les principes de la démocratie constituent d’autres piliers importants de notre vie en société: ils s’appliquent là où les droits fondamentaux ne réservent pas la décision personnelle à l’individu.
Dans ce contexte, nous nous référons au sondage représentatif sur l’assistance au suicide effectué dans douze pays européens. Cette enquête a démontré que jusqu’à 87 pour cent des européens estiment que chacun devrait avoir le droit de décider du moment et de la manière dont il veut mourir et que jusqu’à 78 pour cent peuvent envisager de recourir eux-mêmes à l’assistance au suicide. Sur Internet: http://www.medizinalrecht.org/wp-content/uploads/ 2013/03/Resultats_de_sondages_autodetermination_a_la_fin_de_vie.pdf
En Suisse même, la population protestante et catholique est favorable à 72 pour cent à l’assistance au suicide. Dans: » Reformiert « du 29 août 2008; Sondage GALLUP TELEOMNIBUS du 3 au 12 juillet 2008 effectué par ISOPUBLIC, Schwerzenbach, sur Internet: http://www.reformiert.info/files_reformiert/ 1492_0.pdf ).
2.7. Le citoyen n’est pas un objet de l’Etat
Enfin, il ne faut pas oublier que les individus qui forment la population d’un Etat ne doivent jamais être rabaissés à des objets de l’Etat. Ils sont porteurs de la dignité humaine et celle-ci s’exprime le plus clairement là où un être humain détermine lui-même son destin. Il est donc exclu que ce soit l’Etat ou certaines de ses autorités qui déterminent le destin du ci-toyen.
3. Objectif de la procédure de DIGNITAS / Personnes impliquées
3.1. Un objectif à trois niveaux
Lorsqu’un adhérent souhaite se préparer à un suicide accompagné, le temps important consacré en règle générale à cette procédure a pour objet,
• Premièrement:
De lui indiquer une voie lui permettant de poursuivre sa vie, en lui présentant des moyens d'améliorer sa qualité de vie. Les personnes malades, en situation de handicap ou atteintes de douleurs importantes se verront proposer des améliorations thérapeutiques, en vue si possible de les soulager efficacement et/ou de modifier leur environnement social afin d'améliorer leur qualité de vie;
• Deuxièmement:
Si cet objectif premier ne pouvait être atteint pour des raisons objectives, par exemple,
- du fait de la pathologie du patient ou
- pour des raisons subjectives,
par exemple, si l’adhérent qui refuse les alternatives proposées possède des raisons suffisantes de mettre fin à ses jours,
la procédure a alors pour objet de mettre en place la préparation d'un suicide accompagné, sous réserve d'obtenir la garantie du » feu vert provisoire « (accord de principe du médecin pour la délivrance de l’ordonnance de pentobarbital sodique). Notre expérience nous a en effet montré que, dans un grand nombre de cas, cet accord suffisait déjà à ménager à l’adhérent une alternative concrète. Celle-ci lui permet d’attendre pour voir comment son état évolue et de différer son souhait de mourir. L’adhérent est ainsi à même de vérifier sans précipitation si les conditions exigées pour un suicide accompagné sont bien réunies. Ces conditions sont les suivantes:
- L’adhérent doit avoir exprimé sans équivoque possible son désir d'être accompagné lors de cet acte qui mettra fin à sa vie;
- Il doit avoir exprimé durablement son désir de mourir, c’est-à-dire pendant une période suffisamment longue pour permettre d’en déduire que son souhait de mourir est mûrement réfléchi;
- Il ne doit présenter aucun signe laissant supposer que le désir de mourir résulte de pressions de la part de tiers et pourrait donc ne pas correspondre à sa volonté;
- Il ne doit présenter aucun signe laissant supposer qu'il ne jouit pas de la capacité de discernement nécessaire pour décider de recourir à l'assistance au suicide;
• Troisièmement:
La procédure a enfin pour objet de permettre à l’adhérent qui le demande à l'issue de cette préparation de bénéficier de la possibilité du suicide accompagné.
Il faut néanmoins que les consultations individuelles effectuées pendant cette période par le médecin n'aient permis de diagnostiquer chez le patient aucun empêchement laissant apparaître que ce dernier ne serait pas capable de discernement, qu'il ne serait pas en mesure de prendre librement sa décision ou que son désir de mourir ne serait plus présent. Si ces conditions sont réunies, le médecin délivre l'ordonnance exigée pour le pentobarbital sodique.
Cependant toutes les conditions mentionnées ci-dessus (cf. 1.11.4., page 16) doivent être contrôlées encore une fois en phase ultime, à savoir juste avant le suicide, immédiatement avant la prise du médicament létal.
3.2. Personnes impliquées dans la procédure
Les directives et recommandations médico-éthiques de l'ASSM (Académie Suisse des Sciences Médicales) sur la » prise en charge des patientes et des patients en fin de vie «, approuvées le 25 novembre 2004, donnent un cadre légal à l'assistance au suicide, dès lors qu'elle est effectuée par un seul médecin vis-à-vis d'un seul de ses patients qui le lui a demandé. Il s’agit d’une situation exceptionnelle, qui constitue pour le médecin un véritable conflit. Les directives supposent qu'une seule personne, le médecin, est acteur de cette assistance. Comme différents tribunaux l’ont constaté, les directives ne s’appliquent pas aux autres cas d’aide au suicide par des médecins.
Chez DIGNITAS en revanche, la procédure ne prévoit pas que seuls le pa-tient et le médecin soient impliqués mais que de nombreuses autres personnes, ayant côtoyé le patient d'une manière ou d'une autre pendant les différentes étapes de la procédure, puissent ainsi entendre les ré-flexions de ce dernier à ce sujet.
Bien avant que le médecin n'intervienne, les spécialistes de DIGNITAS sont en contact avec l’adhérent. En règle générale, il s'agit à chaque fois d'une personne différente, car c’est toujours le collaborateur de DIGNITAS de permanence à l'accueil qui prend en charge les adhérents. Ces prises de contact vont de l'échange de courriers aux conversations téléphoniques, en passant notamment par des rencontres personnelles. S'ajoutent également un curriculum vitae, la requête par écrit, les directives anticipées du patient ainsi que les rapports médicaux fournis par les adhérents.
Lorsque DIGNITAS recourt à des personnes ou à des organisations extérieures (cf. 1.5.2, page 7) pour prendre contact avec l’adhérent et vérifier certains éléments, ces dernières sont aussi à même de se faire une idée de la personnalité de l’adhérent. Cette remarque vaut aussi lorsque DIGNITAS fait intervenir un médecin extérieur en vue de procéder à des vérifications.
Si l’adhérent effectue un voyage jusqu'en Suisse afin de rencontrer un médecin, les collaboratrices et collaborateurs de DIGNITAS le rencontrent aussi personnellement. Il en va de même lorsque les adhérents font le déplacement en vue d'un suicide accompagné; à cette occasion, un rendez-vous est toujours organisé entre le patient et au moins deux des collabora-teurs de DIGNITAS.
3.3. Les conséquences qu’il faut en tirer
Il en résulte donc que, chez DIGNITAS, les observations essentielles permettant de conclure que les conditions justifiant un suicide accompagné sont réunies, ne sont pas être effectuées uniquement par le seul médecin traitant en contact direct avec son patient. Au contraire, un nombre important de personnes côtoient l’adhérent de DIGNITAS et en partie aussi ses proches. Ce sont le médecin et ces autres personnes qui, tout au long de leurs rapports avec l’adhérent de DIGNITAS, sont à même de constater unanimement et de manière claire et sans équivoque :
• que le désir de mourir de l’adhérent provient d'une décision mûrement réfléchie dans le temps et que ce souhait n'a pas failli;
• qu'aucun signe d'absence de discernement n'est apparu concernant le désir de l’adhérent de mettre fin à sa vie;
• qu'aucun signe n'est apparu ou ne s’est manifesté de quelque manière que ce soit, laissant penser que la décision de l’adhérent a été prise sous la contrainte ou sous l'influence de tiers.
4. Conclusions
Quiconque a pris connaissance de ce qui précède, et en particulier de la déclaration du Conseil d’Etat du canton de Zurich selon laquelle aucune enquête à l'encontre de DIGNITAS n'a débouché sur une quelconque action en justice depuis la fondation de DIGNITAS, aboutira immanquablement à la conclusion suivante: DIGNITAS accomplit la tâche qu’elle s’est donnée selon des règles claires et transparentes. Ces règles sont garantes de l'excellence de ses prestations, afin non seulement d'adoucir et de prolonger la vie de ses adhérents atteints de pathologies, de handicaps et/ou souffrant de douleurs importantes, mais aussi, dans un nombre de cas comparativement bien plus rares, d'apporter une aide à ses adhérents ayant exprimé leur désir de mourir et pour qui la mort semble préférable à toute autre solution.
DIGNITAS les aide à prendre une décision sur de bonnes bases et veille, grâce à sa procédure hautement différenciée, à ce que chacun puisse faire valoir son droit à l’autodétermination d’une manière qui prend la protection de la vie au sérieux.
Le suicide non accompagné des personnes âgées est en forte progression, ce qui est une des conséquences de la forte augmentation de l'espérance de vie. Ce phénomène est à l’origine de problèmes de santé et de problèmes sociaux qui touchent un grand nombre de femmes et d'hommes âgés, malades et désormais seuls. Dans ces circonstances, les conseils avisés concernant le choix de mettre volontairement fin à sa vie prennent de plus en plus d'importance.
Il serait temps qu'en Suisse, la communauté scientifique finisse par aborder cette question sans préjugés.
Les études sur certains aspects de l'activité des organisations qui rendent possible le suicide accompagné ne concernent malheureusement que les décès volontaires.
La question bien plus importante de l’effet préventif qu’exerce l’action de ces organisations au niveau de la prévention des tentatives de suicide a jusqu’ici peu intéressé les scientifiques – sans parler des médias.
Or, une action politique appropriée exige en tout cas et de manière urgente qu’on dispose de bases scientifiques concrètes et complètes, permettant d'éclairer chacun de ces aspects
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